CC a écrit :Sans doute que les suivants auront le recul nécessaire pour faire la part des choses, ce qui nous semble impossible à nous.
Et pourquoi serions-nous incapables de faire la part des choses ? Y a-t-il vraiment quelqu'un qui serait prêt à dire que l'esclavage n'est pas condamnable ? Peut-on s'imaginer un seul instant que quelqu'un n'ait pas perçu que tenir une personne en esclavage était une chose affreuse, au moins pour la personne tenue en esclavage ? Et ce n'est pas parce que les propriétaires d'esclaves ne tenaient aucun compte de cet aspect qu'ils sont plus pardonnables. Au contraire. Cette manière de ne pas reconnaître aux esclaves le statut d'être humain à part entière est un des éléments les plus abjects de l'esclavage.
Napoléon lui-même était d'ailleurs sensible à cet aspect puisqu'à Sainte-Hélène, il a voulu faire affranchir un esclave noir. Au moment de rétablir l'esclavage, il a toutefois sans grande hésitation mis de côté de tels sentiments d'humanité pour de (mauvaises) raisons économiques et politiques et parce que c'était sans doute plus facile de prendre une telle décision pour des populations qui n'existaient pour lui que sur papier. Il n'y a cependant pas vraiment de motifs de supposer qu'il n'était pas conscient du caractère affreux de l'esclavage.
Drouet Cyril a écrit :Le rétablissement de l'esclavage a largement contribué à l'insurrection générale à Saint-Domingue et du coup à la perte de la Perle des Antilles, fer de lance de la politique coloniale de Bonaparte en Amérique.
Si on lit le texte de Leclerc que vous citez, il en ressort surtout que ce n'est pas le rétablissement de l'esclavage lui-même qui serait considéré comme une erreur, mais plutôt la manière dont il a été mis en oeuvre. Ce qu'il déplore surtout, c'est que l'annonce du rétablissement est arrivée trop vite et lui a fait perdre l'avantage qu'il aurait pu tirer de mettre en place un dispositif militaire avant cette annonce pour empêcher l'insurrection.
Dans une telle perspective, le bien-fondé du rétablissement de l'esclavage n'est pas fondamentalement remis en question et il apparaît assez clairement que si Napoléon avait pris conscience de l'erreur qu'il a commise, il aurait très probablement quand même rétabli l'esclavage mais aurait pris en même temps des mesures plus efficaces visant à éviter la perte de Saint-Domingue.